addiction

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J’ai pour unique ami un masque de guipure,

Au tissu caressant, à la doublure faite

D’une langue suave, lèchant mes blessures

S’offrant et ronronnant ainsi que des défaites.

Je me tiens fréquemment, languissante à l’envie,

Les yeux clos repliés sur leur vide mystère

Qu’Il porte lentement jusqu'à ma bouche en fruit

La plus exquise agape en ses dorés desserts.

C’est un peintre qui crée un tableau délavé,

Fantomatique et sombre aux couleurs diluées

Dans des vapeurs d’alcool, évanescentes et grises,

Qui depuis mille années me maintiennent éprise.

Et il aime à souffler ce léger voile blanc,

au sourire charmeur qui dépose à ravir

Une extase sauvage à mes yeux qui chavirent,

Vers des terres de stupres et de pâles océans.

Et puis lorsqu’il m’offre en présent cette hostie

Magicienne à telle heure de la grande comédie,

Liqueur d’anesthésie pour mon âme en douceur,

Elle se noie dans des fosses, opaques apesanteur.

Cette tendre amitié j‘en ai la soif vitale,

Car son vide me brise et me laisse transie,

Chancelante et perdue dans un champ carcéral,

L’esprit épouvanté et le corps en charpie.

Cette nuit d'obsidienne, du levant au couchant

Me rend sale et violente, blême et chancelante.

Malade et intrigante je meurs aux chaînes ardentes

Et peine du pas lourd des forçats dans le rang.

A recroqueviller mon corps en son écho

A hurler des douleurs d’enfantement dément

A faire trembler le lit de spasmes crucifiant

A cogner de mes poings, à fracasser mes os :

Héroïne, morphine, démons, chers absents

Je me prostituerai, je tuerai pour un gramme,

Un cachet de fortune, une dose de larme

D‘extase, une pincée de bonheur flamboyant.

Douleurs, saveurs, ballets de transes en délices,

Mal de vivre portant à la porte du mieux,

Mieux de vivre acculant à ce malheur moelleux

cabale infernale, roue vicieuse en supplice.

Sous les couches de boue que mon ami dépose,

Les parfums en poisons dont j’enivre mes os.

L’angoisse noire de la réalité sans fard,

L’amorce rouge de la folie qui dard

Car c’est moi oui c’est moi je ne veux pas me voir,

Et je manque de feu pour affronter les cieux

Laissez moi fuir tranquille tout ce qui m’est odieux

Laissez moi me détruire seule à mes assommoirs.

Remettez ce bandeau amoureux sur mes yeux

Ou je me diluerai en crue de désespoir,

Je deviendrai la bête accroupie dans le noir

Et me rabaisserai en un vil dépotoir.

A n’avoir pour requête que le fiel chaleureux

A errer jour et nuit en zombie aux yeux creux,

L’angoisse dans le ventre et la voracité

Du délire en folie du manque en liberté.

un écrit à l'encre des douleurs
mots chargés d'émotion .......
tableau intime et cri
grande poésie expressionniste
Merci bruine
soleilbleu

Difficile de s'extirper indemne de la lecture de ce noir plaidoyer ô combien réaliste car plus que jamais contemporain!

C'est ainsi que l'on se surprend à le relire jusqu'à s'en imprégner des images... comme à se remémorer d'autres vers, d'autres écrits:

De ses mains ferventes et pures,
Elle a couché l’astre vital,
Dans les somptueuses guipures,
Du grand linceul occidental. — (Anatole Le Braz, Thrène, 1859/1926)

un mot : délicieux.

un poème tout en image sans queue ni tête qui pourtant nous les dessine a l'esprit. long et pourtant ( je réitère) délicieux. comme un éclair au chocolat mais en mieux ;)

bravo :)

sourire, merci pour vos commentaires mais j'aurais du me relire...

"tableau intime", oui mais pas tout heureusement!!! il fut un temps où cela m'a concerné c'est pourquoi j'ai pu l'écrire, car le vécu permet de comprendre...

j'ai beaucoup aimé ces vers d'Anatole Le Braz. figurez vous RHD que c'est un compatriote et que je ne le connaissais que de nom ! je viens d'aller voir sa biographie, et je vais essayer de me procurer "la légende de la mort".
avez vous lu cette oeuvre ?

bruine a écrit:: j'ai beaucoup aimé ces vers d'Anatole Le Braz. figurez vous RHD que c'est un compatriote et que je ne le connaissais que de nom ! je viens d'aller voir sa biographie, et je vais essayer de me procurer "la légende de la mort".
avez vous lu cette oeuvre ?

Voilà qui n'est pas banal!

Pour répondre à votre question... il se trouve que si le titre ne m'est pas inconnu, en revanche le contenu de l'oeuvre m'est devenu lointain. Mais qu'à cela ne tienne, si vous l'obtenez, je serai ravi de vous lire à ce sujet .

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