Rencontre avertie...

Les yeux fixes, le regard perdu dans ma mémoire,
je cherche son image. Celle d’un homme particulier, le teint pâle, la démarche légère.
Qu’est-il devenu ?
Je me souviens d’une douceur cachée dans une gestuelle rude,
je me souviens d’une sensibilité ineffable sous un masque froid et pervers.
Discret presque effacé, il n’existait que pour très peu de personnes,
et sa voix pourtant monocorde et presque inaudible se faisait chaude et caressante à mon oreille.
C’était un oiseau de nuit drapé de noir
aux longs cheveux fins,
aux yeux d’acier, brûlant du plaisir d’aimer un corps torturé de désir.
Mourant à l’aube,
l’anonymat de sa vie le préservait de toutes curiosités, de toute atteinte du monde diurne.
Anachorète du sentiment d’affection, blessant et indifférent à tout,
il divaguait parfois tenant des propos indigestes,
et le flot de l’incontinence buccale de son organe de succion, sur la perversité féminine,
se déversait jour après jour, telles les eaux usées de toute une ville dans les égouts,
toujours plus hideux et puant.
Paroles visqueuses, crachées avec dégoût,
sarcasmes d’un homme écorché, au cœur incendié,
ravagé par le chagrin d’un amour perdue.

Errant dans le désert de sa vie, dépourvu de toute humanité,
chérissant la douleur qui le faisait se sentir vivant,
cet homme au passé lourd, au verbe abrupt fût mon ange de lumière.

Sarcastique souvent il m’a appris la patience,
ses idées de misogyne souvent violentées,
la créature s’est révélée angelot docile et tendre,
capable d’être aimé, qualité rare au masculin, et d’aimer à nouveau,
comme veut être aimé une femme de nature libre.
Amour, plaisir et douleur se mêlant,
ce païen s’en est allé un matin d’été,
diamant enfin révélé, pureté retrouvée,
l’enfant vivant de l’Amour et de la Vie.

Toi qui l’a rencontré, aime le sans le trahir,
il est encore la Bête que j’ai connu,
ne le gâche pas, votre bonheur sera éternel !

Lunessences

18/07/2004
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