machine et sentiments

Dernière édition par bruine le Ven 30 Oct 2015 - 14:14, édité 3 fois

Machine et sentiment

Sur le continent des corps et des âmes en peine,

Elle coure depuis l’ aube, à perdre son haleine,

Pas de couloir mais un ilot cerné de vitres

Ornementées d’ humains aux moniteurs sinistres.

Des numéros sans noms, juste sur son papier,

C’est son trésor ami pour ne rien oublier.

Combien… quinze au moins, service soins intensifs,

Des vies à trop peu tendre sans moments passifs !

Un pansement ici, et irriguer ailleurs,

Tout ce sang qui s’enfuie, ces caillots, ces humeurs,

Tous ces corps exposés en l’adieu aux pudeurs,

Cette violence crue de la chair aux couleurs

Sans astuces ni fards ni robes veloutées

Pour dérober le corps à la réalité,

De la machine à vivre lorsqu’elle est brisée,

Et qu’il faut reconstruire son identité.

Quelques uns à sourire et à lui quémander,

Le temps d’une boutade un morceau d‘alizée,

Quelques autres à souffrir et à lui murmurer

Pour le temps d’un sanglot un bout de vérité.

Elle comprend elle espère et elle offre son cœur,

Elle supporte les ordres et les condescendances,

Et les indifférences aux portes closes des pleurs,

C’est son métier son choix, il était son essence.

Elle sera dérangée, sans cesse interpellée,

Par les Dieux inflexibles ou bien les saints en transe,

Le ballet souterrain des cliniques de France,

Programmer, planifier pour rentabiliser

Vingt ans à barouder de mutisme en suppliques,

À porter les misères des hommes et des femmes…

Aujourd’hui, insidieux, un mal atteint son âme

Comme un goût de dégout du malheur cathartique.

Son rôle n’est que labeur car la faim pathétique

Du sorcier pris aux griffes de la manne damnée

Guettant la crue sans fin des besoins dramatiques

Des hommes d’aujourd’hui en leur carrosse usé,

A désarticulé le fragile équilibre

De sa force morale à a miséricorde.

Elle ne peut plus donner et, lassée de sourire

S’enfonce sans un bruit dans l’oubli de son ordre.

Elle ferme son regard au désespoir de ceux

Pour qui elle souhaiterait la vie à l’infini,

Elle éteint dans ses yeux la lumière chérie

De la promesse bleue des lendemains heureux .

Bonjour bruine,
Vous nous présentez là un texte qui appelle à réflexion, ne serait-ce qu'à propos des interrogations de ceux qui ont vocation humaine, dans un secteur d'activité prétendument « non marchand » que vous connaissez si bien mais qui paradoxalement est de plus en plus contraint par les impératifs de rentabilité d'une société d'économie dite « libérale »…
Amitiés.

Bonjour bruine,

Une vocation qui est un véritable sacerdoce mais exige un maximum d'humanité, de compassion, de dévouement et de disponibilité, une vocation où la rentabilité que l'on exige de plus en plus dans notre société finit par décourager tous ceux qui jusqu'alors donnaient sans compter.

Amitiés
Jeannie.

Bonjour Lucien et Jeannie, merci pour vos commentaires.
Il vaut mieux je pense travailler en hôpital (public) même si restrictions budgétaires et restrictions de personnel...

Pour jeannie, je pense qu'aujourd'hui (et depuis longtemps ) on ne peut plus parler de vocation. Les infirmiers sont des techniciens. .. des secrétaires. .. des intermédiaires. .. L'idéal est de concilier technicité, rapidité et humanité. ..

Bien amicalement

La vacation titularisée pour un temps indéterminé prend peu à peu le pas sur la vocation d'antan...
Reste que ce poème laisse libre cours à la pensée humaine et que tout y semble encore permis, au moins dans l'âme...

Merci pour cela.

Bonsoir RHD

Les personnes sensibles le restent mais se durcissent. On est un peu obligés. .. mais on n'y arrive pas toujours.
Et cela n'empêche pas la compassion.
Enfin, c'est comme partout, il y a de tout.

Amitiés

Oui, ainsi nous pouvions suivre dernièrement une série télévisée dont hélas j'ai oublié le titre, et qui répondait parfaitement à ce même sujet ( L'héroïne: une infirmière à la fois charismatique et douée!)

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